Le château des animaux tome 4 : Le Sang du roi
Plate-forme : Bande Dessinée
Date de sortie : 12 Novembre 2025
Résumé | Test Complet | Actualité
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Développeur :
Genre :
Bande dessinée
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Non
Jouable via Internet :
Non
Test par

Nic007


8/10

Scénario : Xavier Dorison
Dessin : Félix Delep

Ce dernier tome du Château des animaux clôt la série en apothéose, dévoilant une fin qui, sans fracas, vibre et émeut profondément. Dorison et Delep nous offrent non seulement la conclusion d'une belle histoire, mais aussi une réflexion empreinte de tendresse, de révolte et de courage. Le récit débute par ce qui semble être une petite victoire. Le taureau dictateur, Silvio, se voit contraint d'organiser un vote, un geste qui lui paraît un poison, mais qui représente une promesse pour les autres animaux. Cette élection n'est pas qu'un simple processus politique. C'est un rituel de foi, une épreuve pour les animaux soumis au taureau et à ses quelques – mais puissants – partisans. À mesure que la campagne électorale s'intensifie, l'atmosphère au château devient pesante. Du côté de Silvio, tous les coups sont permis : coups bas, manipulations, peur, promesses, propagande. Les animaux les moins évolués commencent à se laisser séduire par les vaines promesses de Silvio. De son côté, le Mouvement des Marguerites, qui, après des débuts timides, s'était déjà ancré dans le cœur de nombreux animaux, commence à s'essouffler dans la semaine précédant les élections, car sa dirigeante se contente de répondre honnêtement aux demandes des animaux. Le peuple, comme chacun sait, aime se faire berner. Mais Mlle B la chatte, César le lapin et Azelar le rat, sans être des héros parfaits, portent une armure intangible immense : l'obstination à continuer de se battre pour les valeurs auxquelles ils croient.  Au fil du récit, la tension monte crescendo. Le château se transforme en un champ de bataille fait de mots, de souvenirs, de manœuvres électorales et de courage. Je n'en dirai pas plus pour ne pas gâcher la surprise, mais sachez que Dorison n'épargne pas à ses lecteurs les moments douloureux. Certaines pertes nous laissent un goût amer, d'autres nous contraignent à une pause, le temps d'avaler notre salive.

Pourtant, jamais on ne ressent de gratuité, car la fable acquiert une dimension politique sans perdre son âme poétique. Elle fait écho à La Ferme des animaux de George Orwell , bien sûr, mais l'intrigue se développe ensuite en quelque chose de plus poétique et percutant. Dorison emprunte l'esprit critique d'Orwell tout en construisant une œuvre qui résonne avec notre époque avec une clarté presque troublante. On y perçoit des reflets de notre temps actuel : la séduction des discours faciles et la fascination dangereuse pour les figures qui promettent l'ordre tout en brûlant les libertés. À l'heure où, partout dans le monde, nombreux sont ceux qui se laissent charmer par les discours propagandistes et démagogiques, ce récit se dresse comme un avertissement pour quiconque semble refuser de voir l'évidence. Ce livre nous rappelle que la démocratie est aussi fragile que le cristal, mais aussi résiliente que ceux qui refusent de baisser les bras. Il nous rappelle que l'union des plus vulnérables peut renverser les tyrans les plus féroces. Il nous rappelle que l'espoir ne naît pas du néant. Il grandit lorsqu'on décide de ne pas abandonner. Il y a des moments où le château semble s'écrouler. Le rythme s'accélère, la peur grandit, mais à l'horizon, il y a toujours une lueur d'espoir. C'est cette lueur qui rend cette fin non seulement émouvante, mais nécessaire. Lorsque l'histoire atteint enfin son point culminant, on ressent tout le poids du parcours. Ce n'est pas une victoire simple, ni un triomphe sans bavure. C'est un accomplissement qui a un prix, qui fait mal, qui exige. Et c'est précisément pour cette raison qu'il a de la valeur. La série s'achève en apothéose, non par grandeur, mais par la vérité émotionnelle qu'elle laisse au lecteur. Le tout avec une beauté incomparable, où les personnages restent gravés dans notre mémoire, où les moments dramatiques nous attristent, mais où, au final, subsiste une lueur d'espoir pour l'humanité. C'est peut-être bien la série que nous devrions tous lire. Majestueuse, impressionnante, et l'une des meilleures œuvres de Xavier Dorison, un auteur qui, il convient de le rappeler, a signé bien d'autres récits magnifiques.  Delep, à son tour, illustre ce volume avec une maturité visuelle qui nous émerveille et nous émeut. Les expressions des animaux semblent chargées de vie intérieure : le regard de Miss B en dit plus que bien des monologues, la brutalité de Silvio pèse sur le dessin comme si le papier craquait. À chaque page, on perçoit une évolution dans le dessin, l’auteur sachant sublimer la beauté des trois volumes précédents, comme s’il atteignait le sommet de son art. Le travail détaillé, méticuleux et poétique que nous offre Delep est véritablement impressionnant.

VERDICT

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En bref, et en considérant l'œuvre dans son ensemble,  Le Château des Animaux rejoint ce cercle restreint de bandes dessinées qui ne s'arrêtent pas à la dernière page. Elles restent gravées dans votre mémoire, dans votre cœur, et imprègnent votre vision du monde. Dorison se révèle ici un auteur au sommet de son art, capable de tisser un récit qui, même sous forme de fable, nous frappe par sa pureté et son authenticité. Ce dernier tome ne se contente pas de conclure une série magnifique, il la couronne. Avec beauté, courage, intelligence et profondeur.

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