"Hshouma" de Zainab Fasiki est un véritable bijou qui, en seulement 120 pages, vous montrera les maux qui enserrent la sphère sexuelle marocaine tant au niveau de la loi que de la Hshouma, la "culture de la honte". Un texte que nous devrions tous lire et qui a vraiment beaucoup à nous apprendre. Hshouma au Maroc signifie "honte" et désigne tous les sujets tabous qui ne doivent pas être abordés en société ou en famille. C'est le nom choisi par la féministe marocaine Zainab Fasiki pour un projet artistique qui est aussi une dénonciation de l'oppression des femmes - pas seulement dans son pays - et une leçon libératrice d'éducation sexuelle. Par le dessin et l'écriture, Fasiki redéfinit les canons de la beauté, se moque des hypocrisies de la société patriarcale et démolit ses stéréotypes un par un. Aussi courageuses et ironiques que leur auteur, ses femmes défient les préjugés et les conventions, impliquant le lecteur dans la construction d'une nouvelle identité. Ce livre réunit l'art, le message et le combat d'une auteure courageuse qui, sans renoncer à la réalité locale dont elle est issue, s'adresse aux femmes du monde entier.

Le travail de Zainab Fasiki (artiste, ingénieur mécanique et militante des droits de la femme au Maroc) et sa production pleine de corps, réels et imparfaits, redonne de la dignité à tous ces détails qui sont habituellement éradiqués ou cachés dans une érotisation constante de la figure humaine. Hshouma n'est pas une bande dessinée au sens strict du terme, mais plutôt un manifeste sous forme graphique, une sorte de pamphlet politique qui utilise des slogans et des éléments stylistiques de fanzine et revendique une vision féministe non occidentale du corps et de la sexualité, les deux macro-thèmes que ce petit volume se propose d'aborder. Ceux qui ruminent ces sujets au quotidien y trouveront probablement des thèmes et un langage déjà familiers aux batailles de revendication sexuelle que nous voyons depuis des décennies, mais la "simplicité" des tons (si l'on peut parler de simplicité à propos de certaines questions) est intentionnelle, car le texte s'adresse précisément à un public peu familier de ces sujets et peut-être pour cette raison moins repoussant ou plus efficace que de nombreux volumes populaires - très valables. Les spécificités de la lutte féministe marocaine (comme le problème de trouver un vocabulaire sexuel neutre en darja, la langue parlée par la majorité de la population) et la différence avec le psychédélisme coloré qui domine habituellement les illustrations de Fasiki sont particulièrement intéressantes : ici, le trait reste décisif mais devient monochrome et neutre, avec des contrastes marqués de noir et de blanc et la seule inclusion de rose (rouge dans l'édition originale, pour "le sang de toutes les victimes"). Une voix forte, une étape importante.