Scénario : Jean-Luc Cornette
Dessin : Jürg
d'après le roman de Jean Teulé
Alors que les histoires de meurtres en série remontent loin dans le temps, les explications des tueurs semblent passer de la psychologie rationnelle à des discussions plus primitives sur le mal, peut-être parce que les archives historiques sont si rares qu'aucune autre explication n'est possible. Hélène Jégado est un cas beaucoup plus récent. Et, comme Jean Teulé présente son histoire dans "Fleur de Tonnerre", la raison de ses trois douzaines de meurtres se situe quelque part entre la compréhension psychologique et le mal humain. Nous en savons un peu plus sur elle que sur les premiers tueurs en série, mais nous n'en savons pas assez pour savoir pourquoi elle a empoisonné tant de gens avec si peu de motivation. Hélène Jégado est née dans un village breton reculé en 1803. Jean Teulé nous raconte qu'elle a été imprégnée de mythes et de légendes celtiques en grandissant. En fait, sa langue maternelle n'était pas le français; elle parlait breton jusqu'à ce qu'elle aille chercher du travail après avoir (prétendument) empoisonné sa mère et que son père ait vendu la ferme familiale. Hélène ne s'est jamais mariée. Elle a vécu une vie itinérante, travaillant comme cuisinière dans n'importe quelle maison qui l'engagerait. Partout où elle allait - pour autant que nous le sachions - elle saupoudrait de la poudre d'arsenic dans la nourriture de ses employeurs. Les premiers meurtres attribués à Hélène ont eu lieu en 1833 et elle a continué à tuer des gens jusqu'à son arrestation en 1851 (avec un écart inexpliqué de 10 ans dans les années 1840). Après un bref procès, Hélène a été exécutée par la guillotine.
La raison invoquée par Teulé pour les meurtres capricieux d'Hélène est qu'elle a peut-être cru qu'elle était l'Ankou, la personnification bretonne de la Mort, ou qu'elle travaillait pour l'Ankou. Tout au long de Fleur de Tonnerre, Hélène évoque sa mission: éliminer le plus de monde possible au nom de l'Ankou. À la toute fin du livre, cette explication est davantage élucidée comme la manière d'Hélène de gérer la peur et l'incertitude de la vie en se donnant le contrôle sur la vie de ses victimes. La Bretagne est toujours obstinément celtique. Beaucoup de saints catholiques des églises de la province sont vénérés ouvertement selon les croyances celtiques. D'anciens rituels, superstitions et histoires régissent la vie des gens, au dégoût de leurs voisins «français». Fleur de Tonnerre contient quelques détails supplémentaires pour nous aider à comprendre l'étrangeté de la Bretagne dans la première moitié du XIXe siècle. Pourtant, il conserve encore cette étrange simplicité de style presque folklorique. L'adaptation graphique rend encore plus palpable l'atmosphère lourde de la Bretagne profonde, où traditions et superstitions ont encore la vie dure.
VERDICT
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Fleur de Tonnerre a le même sentiment d'intemporalité que le folklore. Le livre a un fort sentiment d'appartenance, mais son intrigue semble provenir d'un passé profond tout en portant un fort sentiment d'avertissement sur le côté le plus sombre de l'humanité, les parties que nous ne comprenons toujours pas après cent ans de psychologie moderne.