Le cimetière est le lieu où les vivants peuvent commémorer physiquement leurs proches. Les protagonistes de cette histoire ont construit de véritables maisons de vacances dans le cimetière où reposent leurs proches, et chaque été, comme dans un camp normal, ils y passent du temps, transférant leur routine quotidienne de linge à étendre et de devoirs à faire. La mort n'est pas un sujet que l'on aborde de manière rationnelle, et de nombreux auteurs l'ont traité de manière globale, en soulignant surtout les vides que les personnes qui ne sont plus là laissent dans nos existences. SantaMatita raconte plutôt la vie qui continue malgré la mort et avec la mort, à travers les amours adolescentes, les ragots, les plants de tomates, les légendes urbaines, etc. Nous ne savons comment l'exprimer, mais l'humanité de cette histoire qui se lit en quelques heures est d'une simplicité désarmante : les gens entrent et sortent de nos chemins et pendant ce temps, nous entretenons les plantes, jouons, nageons, découvrons, faisons preuve de curiosité, rencontrons d'autres personnes, nous cachons, traînons, dînons, offrons de l'aide, pleurons, nous faisons des amis, faisons du bien à des personnes que nous ne reverrons peut-être jamais, recevons de l'aide, buvons du café, réparons et continuons toujours pendant ce temps à construire, construire autour de la mort et paradoxalement entouré de morts. C'est ce qui se passe dans ce roman graphique entre la liberté du camp d'été et la pression constante de cette chose de la vie qui se produit et change le passage du temps.

Serena Ferrero (alias SantaMatita) est une illustratrice à la plume fantastique et ici elle la met entre les mains de différents types, nous parlons en fait d'une histoire chorale incroyable. Dans "Un dernier été au cimetière" (L'ultima estate al cimitero) La relation des personnages avec la mort n'est pas unique. Certains la portent comme un poids dans leur cœur, d'autres pensent qu'ils ne pourront plus jamais être heureux. Certains n'ont pas encore accepté la mort de leurs proches, d'autres doivent la métaboliser. La prise de conscience du caractère inéluctable et irréversible de la maladie est, ce qui effraie le plus. L'écrivainte italienne Valeria Parrella nous a dit un jour que l'on change totalement quand on voit une personne que l'on aime être là, et qu'une seconde plus tard, elle n'est plus là. Jamais plus. La tristesse appartient à ceux qui restent sur terre, mais nous oublions peut-être qu'eux, au moins, restent en vie. Dans "Un dernier été au cimetière", des protagonistes passent chaque été des vacances auprès des morts, certains pour une courte période, d'autres pour vingt ans, certains ont même une maison au cimetière. La nouvelle que ce sera le dernier été où ils pourront s'y rendre pour une longue période déstabilise tout le monde, et à travers leurs histoires, nous découvrons ce que signifie le fait de lâcher prise. Serena Ferrero a le grand mérite d'avoir écrit une bande dessinée à la fois délicate, drôle et cathartique.