Réalisé par Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich.
Dans "Filles de joie", nous suivons trois femmes qui traversent ensemble la frontière belge chaque jour pour se prostituer en France en secret. En dehors du travail, elles ont peu de choses en commun jusqu'à ce qu'un événement ait lieu qui les liera à jamais. Ces "filles de plaisir" ne s'entendent pas toujours, mais elles refusent d'être des victimes et prennent les choses en main lorsque cela est nécessaire, parfois avec des conséquences fatales. Il fait nuit, la pluie tombe et trois personnages enterrent un corps enveloppé dans des sacs poubelles. Le ton est donné. Le reste du film vous fera vous demander avec chaque personnage masculin qui a été enterré dans la première scène. Est-ce l'ex agressif, l'adolescent débraillé ou le client adultère ? Après cette scène d'ouverture cruciale, nous faisons la connaissance d'Axelle, une jeune mère dans un appartement beaucoup trop petit, où elle doit non seulement s'occuper de ses enfants mais aussi de sa propre mère. C'est chaotique et, en arrière-plan, un de ses fils crie "Je veux tuer ! Je veux tuer !". Axelle ne veut plus rien avoir à faire avec son ex agressif, le père des enfants, et essaie de garder la tête hors de l'eau. Quelques instants plus tard, nous rencontrons également Dominique et Conso, avec qui Axelle se rend chaque jour en voiture à la maison où elles travaillent ensemble comme prostituées. Toutes trois sont des femmes totalement différentes, avec des parcours différents, mais une chose qu'elles ont en commun est la double vie qu'elles mènent.
Les trois personnages principaux sont un vrai plaisir à regarder. Quoi qu'elles fassent, en tant que spectateurs, vous êtes inconditionnellement de leur côté. Grâce au jeu naturel de Sara Forestier, Annabelle Lengronne et Noémie Lvovsky, nous voyons trois femmes magnifiques en équilibre entre l'audace d'une femme adulte et la fragilité d'une jeune fille. Elles doivent faire face au sexisme, aux hommes dominants, aux clients gênants et aux irritations mutuelles, mais en fin de compte, c'est la solidarité féminine qui prévaut. Vous pourriez faire un film sur les trois personnages séparément. Par exemple sur la solitaire Conso, qui crie le plus fort, mais cherche secrètement l'amour et l'affirmation sous quelque forme que ce soit. Ou encore la vieille Dominique - aussi appelée Mama - qui soutient sa famille mais ne reçoit que peu de reconnaissance en retour. Elle brille dans une scène particulièrement intime où elle prend un bain avec un homme plus âgé qui, malgré son âge, est en quête d'affection. En bref, les personnages sont habilement travaillés et constituent une histoire en soi. La perspective narrative non chronologique, qui à son tour éclaire les côtés des trois femmes, est quelque peu déroutante au début, mais finit par redevenir claire.
VERDICT
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Filles de joie est un portrait socio-réaliste convaincant dans lequel vous vous plongez de manière inattendue dans la vie de plusieurs personnes et en ressortez brusquement. Vous n'avez pas besoin d'une introduction, vous en faites soudainement partie. En ce sens, ce film relativement court aurait pu durer plus longtemps, afin que vous puissiez dire un au revoir approprié à trois femmes résistantes auxquelles vous vous êtes rapidement attachées. En revanche, c'est une grande réussite des réalisateurs Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich que l'on ait l'impression que c'est un jour aléatoire dans la vie de trois femmes héroïques.