Dans un lointain futur, un vaisseau vogue dans l'obscurité de l'espace. Il n'y a pas l'ombre d'un être vivant ou d'un astre à des milliards d'années-lumière. La capitaine Lexi Néel vit ainsi en stase depuis très longtemps, mais aujourd'hui un androïde a déclenché la procédure de réveil. Nous sommes à bord du vaisseau Argo surveillé par Loop, un robot doté d'une intelligence artificielle et d'une apparence humaine afin de communiquer avec l'ordinateur de bord. Lexi apprend qu'elle va bientôt atterrir sur Terre et le retour à la vie civilisé va demander un temps d'adaptation. L'hyper-sommeil peut entraîner certaines perturbations, le cerveau fonctionnant au ralenti durant toute la période qui a procédé le réveil, ce qui engendre quelques effets secondaires fort gênants : Altération possible de la mémoire, des sens ou de l'orientation. Le voyage n'est toutefois pas terminé, le vaisseau Loup se trouve dans le système d'Alpha Centuri, à une distance de 4,2 milliards d'années-lumières de la Terre.

Suite à un appel de détresse, Lexi se rend sur Aiôn, un satellite forestier, pour une mission de reconnaissance. Elle décide de s'y rendre et rencontre un scientifique qui va lui faire prendre conscience qu'elle a voyagé dans le temps. Cependant, au fur et à mesure que les jours passent, Lexi constate que le scientifique et l'intelligence artificielle ont des comportements étranges. Mais le véritablement problème vient d'elle : Lexi est coincé dans une boucle temporelle, elle est destinée à revivre sans interruption les mêmes événements encore et encore. Il y a d'ailleurs un hommage à peine caché au film "Un jour sans fin" avec un extrait de la chanson "I got you babe" à la page 29, mais l'ambiance est ici beaucoup plus froide. Au-delà de l'aspect fantastique, la structure de la BD répond au schéma de la tragédie classique. A travers la parabole d'un damné soumis à son destin, Lexi subit le mythe de Sisyphe, coincé sous un ciel déserté par les dieux et accablé de questions qui ne trouvent pas de réponse. L'impossible avenir et l'éternel recommencement. Heureusement, si Lexi n'a pas d'emprise sur l'environnement, elle en a sur elle-même et le mécanisme finit par se gripper. Il y avait une autre possibilité de sortir de cette boucle sans fin (l'auteur l'évoque dans un rêve de l'héroïne à partir de la page 117) mais sa mise en place aurait été clairement déroutante pour le non scientifique. Le dessin apparaît lui aussi assez froid mais il s'avère parfaitement en phase avec la thématique abordée et l'aspect futuriste d'Aiôn.