Charlotte de Belgique, alias Charlotte de Saxe-Cobourg, était la fille du premier roi de Belgique, Léopold Ier. Nous la retrouvons sur le sol mexicain au début de ce troisième récit, en 1864. Un mois plus tard, son mari Maximilien, archiduc d'Autriche, vient également s'installer au Mexique. Charlotte tient particulièrement à éviter une guerre contre les "juaristes" rebelles. Son mari Maximilien est d'un autre avis et les choses se gâtent. Les révoltes prennent de l'ampleur et pire encore, l'armée française se prépare à quitter le Mexique. Dans cette bande dessinée, le scénariste Nury le dépeint comme un ivrogne, un chef obsédé par le sexe qui aimerait bien gagner la bataille contre les juaristes et avoir une chance de devenir le seigneur et le maître de toute l'Amérique latine. Quelques recherches nous ont appris que les choses étaient différentes dans la réalité. C'était plutôt Charlotte qui avait des projets d'expansion, tandis que son mari devait être considéré comme une marionnette des Français dirigés par Napoléon III. Charlotte sera connue sous le nom d'impératrice "Carlota". Maximilien souhaitait vivement avoir un héritier, mais cela ne s'est pas fait naturellement et l'adoption a été envisagée. A l'occasion, et même souvent en public, Maximilien humilie sa femme en l'accusant de ne pas pouvoir assurer sa descendance. Refusant de partager sa couche avec lui, le sachant atteint de syphilis, Charlotte doit se résoudre à avoir recours à l'adoption. À moins qu'elle ne finisse par succomber à l'appel de la chair avec le ténébreux colonel Alfred van der Smissen...

Trois ans d'attente pour un nouvel album. C'est long, mais la récompense n'en est que plus grande. Et puis il y a les dessins de Matthieu Bonhomme : L'élégance des décors et des costumes (il suffit de jeter un coup d'œil aux pages 24 et 25 pour remarquer tous les détails de la tenue et du trône de Maximilien), la créativité des cadrages (de "beaux" exemples sont la scène d'exécution des pages 54 et 55 et l'attaque des juaristes à la fin de l'album), l'atmosphère menaçante et hostile et aussi une touche d'érotisme (pages 58 et 59) constituent un cocktail qui nous a beaucoup plu. Le scénariste Nury sait construire une histoire. Il permet à l'illustrateur Bonhomme d'alterner les angles de prise de vue, d'insérer des pages sans texte... Tout est juste. Charlotte l'impératrice se lit comme une adaptation romanesque de Netflix de l'un des faits les plus passionnants de la famille royale belge. Dans la réalité, Maximilien était un homme d'Etat intelligent et Charlotte voulait conquérir toute l'Amérique du Sud. La façon dont Charlotte donne tout pour un pays qui n'est pas le sien et l'entraîne en même temps vers la damnation est à la fois triste et immensément intrigante.